Extraits du livre blanc


 Identifier et traiter les litiges pour réduire les impacts sur les projets

Le célèbre triptyque : coût-qualité-délai comme trame d’un outillage …

Le projet est communément caractérisé par ses objectifs ou livrables, sa durée et la charge humaine ou financière, sa « non-reproductibilité », son organisation temporaire, ses processus et naturellement ses phases et jalons.

La conception et la « production » du projet en visent la prévisibilité, permettent le contrôle et la traçabilité et en valorisent l'expérience acquise.

Les fonctions qui en résultent sont bien délimitées, parfois normées et souvent outillées :

  • En matière de prévisibilité, par la planification, la gestion des risques
  • En matière de contrôle et de traçabilité, par le reporting, la comitologie, le contrôle de gestion, le contrôle qualité, la gestion contractuelle
  • En matière de valorisation de l'expérience acquise, par la gestion documentaire, le knowledge management

… nécessaire mais pas suffisant pour sécuriser le bon déroulement du projet

Ces pratiques de conduite de projet ont largement fait leur preuve dans les domaines de l'organisation et des systèmes d'information.

Elles sont d'autant plus efficaces qu'elles s'inscrivent dans une organisation structurée où les autorités décisionnelles, hiérarchiques et techniques sont reconnues et alignées sur les mêmes objectifs.

L'étude des projets et tout particulièrement des projets ayant connu d'importantes difficultés démontre que ces démarches sont nécessaires mais pas toujours suffisantes pour éviter le retard, le surcout voire l'échec du projet.

Sur ce point, l'intuition de l'expérience est confortée par la réalité des observations. Il semble bien manquer une dimension dans ces approches traditionnelles : la dimension relationnelle, comprise au sens large.

Où sont les relations entre les acteurs du projet ?  

Les projets sont animés et produits par de multiples acteurs qui sont avant tout des personnes mais qui représentent des entreprises, des services, des professions, des fonctions ou des compétences. Dans sa fonction de représentation, chaque acteur joue un ou plusieurs rôles et défend les positions correspondantes.

En ce sens, le terme « d'acteur » du projet porte bien son nom.

Ainsi, dans le projet, chaque personne, en tant qu'acteur, comme en tant qu'individu, porte des besoins et vise des objectifs qui lui sont propres. C'est un fait qu'il est imprudent d'ignorer.

En règle générale, la prise en compte et la régulation des relations entre ces multiples acteurs reposent sur les capacités relationnelles et managériales du Directeur de projet et de ses subordonnés directs (responsables de domaines, adjoints ou conseillers,…).

Traitées par des comités où les postures prennent parfois le pas sur la coopération, ces relations ne tiennent pas toujours compte des intérêts, des contraintes, et des besoins fondamentaux de ces acteurs, de ces personnes.

Aborder ce point de vue relationnel n'est en aucun cas remettre en cause les acquis obtenus par les méthodes « traditionnelles ». Il s'agit là de les compléter, de les consolider pour davantage sécuriser le projet.

Rappelons qu'un tiers des projets connaissant des difficultés donne lieu à l'apparition d'un litige. La gestion des relations, la prévention et la régulation des tensions ou des conflits dans les projets, ne sont pas pris en compte à la hauteur des enjeux qu'ils portent.

Les comités et les contrats ne sont pas les seuls outils pour réguler les différentiels d'enjeux et d'objectifs portés  par chacun des acteurs. Mais, dans la pratique, de quels autres moyens disposent les responsables des projets pour traiter ces différentiels ? 

Derrière le triptyque « coût-qualité-délais » : des acteurs et des relations
Derrière le triptyque « coût-qualité-délais » : des acteurs et des relations

Pourquoi s'intéresse-t-on trop tard à la gestion des relations dans les projets ?

 

La prédominance du « scientifique et technique » dans la culture des dirigeants de projets

Pour des raisons historiques, et de par leur nature, les projets en organisation et systèmes d'information sont conduits et réalisés par des équipes dont la culture dominante est scientifique et technique. Les responsables de ces projets sont généralement peu familiers des sciences humaines et sociales. Ils doivent pourtant assurer trois obligations à laquelle ils ne sont pas toujours préparés :

  • La nécessité de concilier des avis techniques. La complexité croissante des technologies rend aujourd'hui impossible l'application d'une « autorité technique » s'imposant sur tout le projet.  Légitimée hier par la maîtrise de l'ensemble des domaines couverts par le projet, cette autorité a fui le responsable du projet. Concilier les avis des experts techniques des différentes disciplines est une obligation que ce soit avant ou au cours du projet.
  • L'impératif de négocier avec toutes les disciplines. La pénétration des systèmes d'information dans tous les secteurs et dans tous les métiers implique la participation d'acteurs très diversifiés aux projets. Un groupe de travail, un comité de projet, un comité de pilotage réunit désormais systématiquement des acteurs représentant des disciplines et des savoirs très différents. L'interdisciplinarité, voire l'interculturalité, est devenue la norme. Animer les échanges et les travaux pour que ces acteurs se comprennent est un impératif pour faire aboutir le projet.
  • L'obligation de maîtriser les relations entre les acteurs. La structure d'un projet est majoritairement transversale à l'organisation de l'entreprise ou de l'administration, compliquant ainsi la communication et la compréhension mutuelle. Il n'est pas rare que les acteurs rendent des comptes à la fois au directeur de projet et à leur « responsable métier ». Dans ce contexte apparaissent naturellement tous les types d'antagonisme et donc de causes de conflits : conflit sur les ressources, sur les objectifs, sur les valeurs,… L'acteur du projet est à l'épicentre de ces tensions. Le manager de projet doit en prendre toute la mesure pour préserver la performance du projet.

Des conflits ou litiges souvent cachés …

Les responsables de projets, comme les DSI, considèrent majoritairement les conflits et litiges comme des symptômes d'anomalie voire d'échec.

Cette vision se diffuse au sein des responsables et des équipes et génère des comportements nocifs incitant à ignorer ou masquer la controverse ou le conflit. Mais cacher le conflit sans le prendre en compte, c'est le reporter et amplifier ses conséquences. Plus le temps passe plus le coût des effets du conflit non traité augmente. Chacun sait que ne pas régler un désaccord sur des spécifications fonctionnelles peut coûter très cher lors de la validation ou de la mise en production de la solution. Sans parler de la perte de productivité des équipes ou des personnes en désaccord permanent.

Cette croyance selon laquelle le conflit serait «  anormal »  s'avère particulièrement pénalisante pour le bon déroulement du projet. Comment un projet, lieu partagé d'innovation, de conception et de création collective peut-il être imaginé sans aspérité, sans confrontations, sans divergences ?

Le conflit est « normal ». Il constitue souvent une opportunité car il met au jour une difficulté, première étape de la construction d'une solution.

… dont les signaux faibles ne sont pas détectés

Dans la quasi-totalité des cas l'émission de « signaux faibles » traduit le déclenchement d'un conflit avant même que celui-ci ne se révèle. La précocité et la fiabilité de la détection de ces signaux sont deux enjeux majeurs de la prévention des conflits dans les projets.

Plusieurs types de signaux constituent des indices (parfois concordants) d'existence de conflits déclenchés et non révélés. Citons par exemple :

  • Le manque d'assiduité aux réunions de coordination (absences répétées aux réunions projets,…)
  • Le non-respect des engagements pris (action convenue non réalisée,…)
  • La remise en cause des choix techniques arrêtés
  • La disparité des charges de travail des équipes affectées

Ces signaux faibles sont parfois détectés mais demeurent ignorés ou ne font que rarement l'objet d'un traitement approprié.

La gestion des relations est prise en compte … trop tard

Le constat issu de l'analyse des projets, et tout particulièrement des projets ayant connu des difficultés est clair : La gestion des relations est prise en compte… mais généralement trop tard, une fois le conflit déclenché.

Apporter des outils aux équipes et aux responsables des projets pour comprendre et réguler les relations entre les acteurs semble aujourd'hui plus que nécessaire : indispensable...

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« J’avais bien remarqué que certaines tâches de recette qui lui étaient confiées n’avançaient pas et que ses justifications n’étaient pas très convaincantes. Mais dans le feu de l’action, je n’ai pas traité ce problème. Certaines de ces actions étaient sur le chemin critique de notre recette technique et, au final, la recette a pris trois semaines de retard.  Nous sommes entrés en conflit avec notre prestataire car la direction métier nous a accusés de ne pas savoir mener notre projet. C’est remonté jusqu’aux directeurs et j’en ai pris pour mon grade…J’ai compris pourquoi, mais à la fin de la recette : ce prestataire venait d’être embauché, n’avait pas été intégré parmi ses collègues et était en conflit avec son responsable direct qui avait mis en doute ses compétences lors d’une réunion d’équipe interne.


Désaccords, controverses, conflits ... quelles définitions et quelle cinématique ?

 

Définir clairement pour diagnostiquer précisément

Dans le simple but de clarifier les propos, nous proposons d’utiliser les terminologies suivantes.

  • Le désaccord est une opposition entre personnes ou groupes de personnes sur un sujet donné. Un désaccord peut générer une controverse ou un conflit.

  • La controverse est une confrontation d’idées qui peut être d’ordre technique, fonctionnelle, organisationnelle. Dans la controverse, l’émotion est présente mais le message entre les parties n’est pas toxique car il n’y a pas de remise en cause des personnes ou de leurs besoins fondamentaux.

  • Le conflit est une opposition de volonté telle que la satisfaction de l’une des parties empêche la satisfaction de l’autre partie. Le conflit, chargé en émotions, est le théâtre d’échanges de messages toxiques et donne souvent lieu à la remise en cause des personnes ou de leurs besoins fondamentaux.

  • le litige est le terme générique que nous retenons pour couvrir les trois notions précédentes.

L'événement déclencheur et l'événement révélateur : deux moments clés de la prévention et du traitement

Qu'il s'agisse d'un désaccord, d'une controverse ou d'un conflit, deux événements sont à prendre en compte afin de traiter le litige de manière efficace :

  • Comme son nom l'indique, l'événement déclencheur va déclencher le litige sans nécessairement le révéler. À partir de cet événement (qui peut être extérieur aux parties), le  litige qu'il soit une controverse ou un conflit entre dans une phase où au moins l'une des parties ajuste son comportement et son avis par rapport à l'autre partie. Il n'y a pas d’événement déclencheur type. Ce peut être un énième retard dans la livraison d'un document technique, un test qui ne se déroule pas comme prévu ou l'interprétation d'une attitude au cours d'une réunion.

« Le jour ou Carine a été nommé responsable fonctionnelle du domaine financier au sein de la DSI, j'ai compris qu'elle roulait pour elle… Et dire que nous nous connaissons depuis 15 ans…»
  • L'événement révélateur révèle donc la controverse ou le conflit. La survenance de l’événement révélateur peut se produire très rapidement ou très longtemps après l'apparition de l’événement déclencheur. Dans l'intervalle, le conflit est latent mais existe entre les parties concernées. Une fois l’événement révélateur intervenu, des stratégies de traitement du litige sont mises en œuvre par chacune des parties (contre argumentation technique, dénigrement personnel, alliances, hostilité,…). À partir de cet événement, le litige est généralement visible des autres acteurs du projet.

« J'attendais une réponse de Romain avant vendredi 15 heures pour déclencher l'intégration. Une fois de plus, elle n'est pas venue. Il me fait le coup à chaque fois. Là, c'est terminé. J'arrête de l'aider…»
Bien distinguer la controverse du conflit

Il importe de distinguer les deux formes de litiges que sont la controverse et le conflit dans les projets :

  • La controverse est une opposition s'inscrivant dans un champ technique se traduisant par une confrontation sur des options ou des choix tels que l'organisation du projet, les orientations techniques imposées, les choix techniques retenus,…

  • Le conflit, tel que nous l'envisageons, est également une opposition mais intervenant dans un champ plus large que la controverse et mettant en cause directement les parties et leurs besoins. Ses origines peuvent être multiples : difficultés relationnelles, manque de connaissances ou d'informations, défauts structurels, pénurie de ressources, interprétation culturelle, divergence des besoins et intérêts,… 

Contrairement à la controverse, le conflit est causé par une souffrance d'au moins une des deux parties.

Une controverse peut dégénérer en conflit lorsque le débat, à l'origine technique dérive vers la mise en cause des intérêts et besoins d'une des parties.

A l'inverse, un conflit peut « progresser » en controverse lorsque l'opposition est débarrassée des messages toxiques et se positionne sur le champ technique.

Illustration de la cinématique d’un litige
Illustration de la cinématique d’un litige

Traitement des controverses et des conflits, principes généraux

 

Le traitement de la controverse

La controverse est donc une forme de litige portant sur des points techniques (au sens large : méthode, choix technologiques, organisation, contrôle du projet,…) pouvant se résoudre par un accord entre les parties ou par l'autorité.

Elle s'inscrit dans un cadre reconnu et respecté par les parties (le projet) et porte un objectif commun du point de vue des parties (économiser des ressources par exemple).

Le règlement de la controverse peut intervenir :

  • Si les deux parties parviennent à s'entendre sur une solution qui peut être celle promue à l'origine par une des parties ou conçue conjointement par les parties
  • Par la décision d'une autorité à laquelle les deux parties acceptent de se référer.

Ainsi, soit les deux parties parviennent à coproduire une solution à leur controverse, soit elles s'exposent à une décision externe qui risque de ne pas leur convenir.

« Agnès voulait absolument que nous nous équipions d'une plateforme progicielle de pilotage de projet, Patrick pensait qu'on s'en sortirait avec nos outils bureautiques. Je les avais chargés de me proposer une solution. Le débat a duré trois mois… sans résultat. À la fin, je les ai réunis. Ils ont fini par accepter de ne pas décider seuls et de se soumettre à la décision du directeur du projet… qui a décidé de nous outiller avec un service en ligne …»

 

La médiation ayant pour objet d'aider à résoudre les litiges et de préserver les relations futures, il est essentiel de convaincre les parties (a minima sur les raisons du choix) après les avoir contraintes.

Les parties doivent comprendre et accepter le choix arrêté (et ses raisons) pour préserver le bon fonctionnement du projet.

Le traitement du conflit

L'approche que nous retenons pour l'analyse et le traitement des conflits dans les projets est l'approche dite de Harvard qui recommande de :

  • Distinguer les positions prises par les parties de leurs intérêts ou besoins. Ce sont les besoins, souvent cachés derrière les positions, qu'il convient de mettre au jour pour rendre efficace la négociation et le traitement du conflit. Seul le traitement des besoins aboutit à une solution pérenne,
  • Dissocier le problème à traiter des personnes et de leurs émotions. Les émotions doivent être traitées, généralement avant le ou les problèmes pour dépassionner les échanges nécessaires à la résolution,
  • Détendre les tensions et desserrer les freins pour permettre aux parties en conflit d'explorer ensemble le « champ des possibles » dans lequel les options et les solutions pourraient se trouver,
  • Favoriser la créativité des parties pour les inciter à identifier et formaliser les solutions possibles.

Besoins fondamentaux et escalade d'un conflit, outils de diagnostic

Une modélisation de la hiérarchie des besoins s’appliquant aux individus et aux organisations

La pyramide des besoins issue des travaux conduits par Abraham Maslow décrit les cinq niveaux hiérarchiques des besoins des personnes.

Elle s'applique également au monde professionnel et éclaire le traitement des conflits en facilitant le décodage d'expressions ou d'attitudes.  Ce modèle facilite l'identification des besoins ou des manques révélés lors des échanges entre les parties.

Le processus d’escalade dans un conflit

Le Modèle de Glasl formalise les étapes susceptibles d'être franchies lors de l'escalade d'un conflit entre deux parties.

Ce modèle décrit trois grands états par lesquels sont susceptibles de passer les parties en conflit.

  1. L'opposition rationnelle et contrôlée, au cours de laquelle la raison laisse petit à petit place à l'émotion : Le conflit évolue selon la séquence : Durcissement – Débat et polémique – Passage à l'action.
  2. La tension focalisée sur la relation, au cours de laquelle l'émotion l'emporte. Le conflit évolue selon la séquence : Alliances et atteinte à la réputation de l'autre, Attaques et tentatives d'isolement de l'autre, Menaces et ripostes.
  3. La confrontation destructrice où l'émotion cède à l'instinct de survie puis de mort (au sens figuré !). Le conflit évolue selon la séquence : Dénigrement de l'autre, Destruction de l'autre, Destruction mutuelle.

 

« Quand nous avons commencé la médiation, la première phrase qu'a prononcé Paul, l'expert technique en charge de l'intégration, à Patrick, le chef de projet a été : de toutes les façons, si ça continue comme cela, je plante le projet et tu couleras avec moi ».

Nous avons dû conduire trois séances particulièrement houleuses au cours desquelles nos deux collègues se sont échangés leurs quatre vérités. Ils se connaissaient depuis 15 ans et il y avait un réel passif entre eux. Nous avons plusieurs fois dû intervenir pour faire respecter les règles de comportement édictées au début de la médiation.

Au final, Paul et Patrick ont fini par comprendre qu'ils seraient tous les deux les premières victimes de leur conflit car la Direction n'allait pas tolérer très longtemps que leurs attitudes fassent peser un tel risque sur le projet. L'émotion a petit à petit cédé sa place à une forme de raison. Le dialogue, toujours tendu, s'est alors orienté vers une opposition sur des sujets plus techniques. Nous savions que le plus dur était passé. »

Le modèle de Glasl : l’escalade d’un conflit
Le modèle de Glasl : l’escalade d’un conflit

Découvrir la médiation avant de l'appliquer aux projets

 

La médiation, une approche et une démarche éprouvées de règlement des conflits

La médiation est un mode alternatif de règlement des conflits visant à l'obtention d'un accord amiable pérenne, coproduit par les parties.

Prenant en compte les intérêts des parties, elle vise à établir ou à rétablir une relation positive en faisant avancer le dialogue et à aboutir à une solution pérenne.

La médiation peut être de plusieurs natures :

  • La médiation interpersonnelle
  • La médiation inter-entreprises
  • La médiation intra-entreprise (entre services d'une même entreprise par exemple)

 La médiation est fondée sur un processus rigoureux, dont le médiateur est le garant et l'animateur.

Dans l'absolu, l'objectif de la médiation est d'aboutir à un accord construit conjointement et partagé par les parties initialement en conflit.

Ce sont donc les parties elles-mêmes qui sont les auteurs et les propriétaires de l'accord obtenu

Cependant, selon le contexte et l'enjeu, certaines médiations peuvent donner lieu à des objectifs plus modestes tels que :

  • Réunir les parties
  • Renouer le dialogue
  • Trouver des pistes de solution

À noter que l'application du processus de médiation ne garantit pas la signature d'un accord entre les parties.

 Le médiateur, acteur central... mais pas décideur

Le médiateur facilite le déroulement de la médiation en veillant au bon déroulement du processus.

Il s'assure de la prise en compte équilibrée des points de vue et des intérêts des parties et à leur compréhension mutuelle.

Selon la nature du conflit, le médiateur peut être amené à formuler un avis pour aider les parties à trouver une solution (cas du médiateur - aviseur). Le médiateur ne participe en rien à la décision sur les solutions.

Le médiateur est tenu au respect de règles d'éthique.

En matière de Médiation de projets, le médiateur est engagé sur :

  • Le secret et la garantie de confidentialité concernant le ou les différends qu'il traite ainsi que toutes les informations échangées à leur propos
  • L'indépendance (du médiateur vis-à-vis des parties), la neutralité (l'issue du litige n'a pas d'impact sur les intérêts du médiateur) et l'impartialité (le médiateur n'est ni pour l'une ni pour l'autre partie) garantissant l'équilibre entre les parties et leur liberté
  • L'information des parties sur les fondements et le fonctionnement de la médiation.
  • la disponibilité. Le médiateur qui ne doit, en aucun cas, freiner ou entraver le processus de médiation.

La médiation de projets : prévenir et traiter les litiges pour réduire les risques relationnels

La médiation de projets : Trois missions essentielles

La Médiation de projets, telle que définie par Médiatris, couvre trois missions portant sur la prévention et la résolution des litiges dans les projets :

  • Intégrer la gestion des relations dans les pratiques de management de projets
  • Prévenir les litiges dans les projets en mettant en oeuvre un dispositif de régulation des relations et de surveillance du climat relationnel du projet
  • Aider à la résolution de litiges en appliquant le processus de médiation impliquant les parties

Ainsi, la Médiation de projets comporte un volet préventif et un volet curatif.

 Le "partnering" comme source d'inspiration

La Médiation de projets, telle que nous l'entendons, s'inspire du « partnering » anglo-saxon visant à construire une relation fondée sur la confiance et la coopération en partageant entre les parties, les risques et les bénéfices des actions menées en commun.

Pratiquement, cette approche se décline pour chacune des parties, en quelques règles qui peuvent être regroupées dans la Charte relationnelle du projet :

  • Veiller au respect de ses engagements et assumer ses responsabilités,
  • Organiser et maintenir une communication fluide entre les parties et leurs représentants
  • Garantir la clarté des échanges et veiller à la compréhension mutuelle
  • Échanger avec l'autre partie dès l'apparition d'un risque ou d'une difficulté pouvant compromettre le bon déroulement du projet,
  • S'engager à coopérer avec l'autre partie à la recherche d'une solution répondant à un problème partagé,

Garantir à l'autre partie la recherche d'une résolution amiable dès qu'un litige (controverse ou conflit) apparaît dans le projet

 Le volet préventif : appliquer la charte relationnelle et surveiller le "climat" du projet

En complément de la nécessaire Charte relationnelle du projet, la prévention de litiges propre à la Médiation de projets repose sur la notion de climat relationnel du projet défini par des facteurs climatiques et des indicateurs mesurables.

Ce climat relationnel dépend directement du bon déroulement d'actions préventives portant sur :

  • Le rappel du contenu et des engagements mutuels figurant dans la charte relationnelle du projet
  • La constitution des indicateurs partagés de mesure et de surveillance des conditions climatiques du projet
  • La mise à disposition des parties d'un terrain neutre d'échange des points de vue et de compréhension mutuelle.
  • La disponibilité du médiateur aidant à structurer les échanges et à faire ressortir et partager les causes racines des tensions. Il permet aux parties de révéler et d'entendre leurs intérêts respectifs.

En prévention, l'attention est portée sur les « signaux faibles » annonciateurs de litiges que les indicateurs du climat du projet permettent de détecter. La détection précoce de ces signaux faibles permet de diagnostiquer les causes et d'agir en amont du litige.

 Le volet curatif : réguler les relations et maintenir la coopération

En complément de la prévention, la Médiation de projets met en œuvre un processus visant à réguler les relations et à maintenir la coopération suite à l'apparition d'un litige.

  • En matière de traitement des conflits, la médiation réunit les parties et les guide dans le processus piloté par le médiateur (cf processus de médiation ci-dessus). 
    Selon le conflit et son enjeu, la médiation permet aux parties de renouer le dialogue, de mieux se comprendre mutuellement, d'identifier des pistes de solution ou de conclure un accord.
  • En matière de traitement des controverses, la médiation réunit les parties, les incite à échanger leurs arguments et à se comprendre et les aide à définir les modalités permettant de clore la controverse : choix d'un arbitre, référence à une autorité (acteur ou instance du projet, personnalité extérieure,…), étude commune de solutions,…

 

La Médiation de projets s'attache enfin à ce que le clôture de la controverse ne génère pas de frustration d'une ou des parties qui risquerait de pénaliser la suite du projet.


Outiller la médiation de projets - La charte relationnelle et les facteurs climatiques

 « L’état de grâce » des premiers jours, l’opportunité à ne pas manquer

Les premiers jours d'un projet correspondant à une forme d'état de grâce au cours duquel toutes les parties sont satisfaites d'engager les travaux communs. Chacun se projette positivement dans l'avenir et dans les futures relations partenariales.

Cette période d'optimisme partagé est une occasion unique pour instaurer un Climat relationnel fondé sur la clarté et la compréhension mutuelle.

« Je sentais, au démarrage du projet, que nous n'étions pas d'accord entre nous (direction financière et direction commerciale)  sur nos besoins de reporting. Je ne l'ai pas évoqué avec l'intégrateur car je craignais qu'il refuse d'engager les travaux de spécifications. Le problème est apparu au cours de leur validation et a généré des tensions au sein de l'équipe projet. Finalement, nous avons dû payer un complément car le travail de spécifications était terminé selon l'intégrateur. J'aurais dû en parler dès le début ».

Tout projet réunit des acteurs vivant des contraintes antagonistes. Chacun le sait mais personne n'ose les exposer par crainte de relancer un cycle de négociation ou de retarder le démarrage des travaux. Par exemple, le client connait les zones de flou de son cahier des charges et sait que son besoin fonctionnel n'est pas très précis sur un domaine particulier. De même, le fournisseur (éditeur, intégrateur par exemple), sait sans l'avouer que sa solution présente des incertitudes ou des lacunes sur une exigence ou une fonction particulière.

Ces non-dits restent masqués jusqu'à leur apparition au grand jour une fois le projet lancé et bien avancé. Leur révélation et leur traitement tardif coûte cher et peut être un motif de conflit, parfois fatal au projet. Toutes les parties en subissent les conséquences.

Pourquoi ne pas profiter de cet état de grâce initial pour évoquer en toute transparence les doutes et incertitudes des uns et des autres ? C'est ce que la Médiation de projets, dans son volet préventif, propose à ce stade. Il s'agit de conduire, sous l'égide du médiateur de projet, une réunion « clarté » laissant à chacun la liberté d'exprimer ses incertitudes sur le déroulement et la bonne fin du projet.

Le Plan d’Assurance Qualité, un outil à humaniser par un volet dédié à la régulation des relations et au traitement des litiges

« Le Plan d'Assurance Qualité (PAQ) est au projet ce que les figures imposées sont au patinage artistique ». Cette citation d'un directeur de grand projet illustre la perception qu'ont la majeure partie des équipes projets de ce document : un outil déshumanisé, certes utile, mais loin d'être suffisant pour « assurer la qualité » du projet et de ses livrables.

La Médiation de projets suggère d'enrichir le PAQ en y intégrant la Charte relationnelle du projet. Cette dernière décrit les modalités de gestion des relations entre les acteurs du projet et notamment :

  • Les règles de comportement des intervenants
  • Le climat du projet, ses indicateurs et modalités de mesure
  • Les litiges et leurs modalités de prévention et de traitement
  • Les engagements des parties et du médiateur de projet

Le « climat relationnel du projet » une notion nouvelle, à partager

Veiller à ce que le Climat relationnel du projet soit tempéré améliore à la fois la qualité de vie des acteurs du projet et sa performance.

Dans cette optique, la Médiation de projets telle que nous la préconisons, utilise le « climat relationnel du projet » comme cadre de mesure des relations et d'aide à la décision.

Les facteurs climatiques sont regroupés en quatre familles :

  • La culture relationnelle du projet permettant de suivre la qualité des relations et des comportements des acteurs,
  • Le fonctionnement du projet correspondant à l'adéquation de l'organisation et des choix méthodologiques et techniques aux caractéristiques du projet,
  • La performance du projet portant sur la qualité des livrables et le respect des engagements pris (planning, coût,…),
  • Les perceptions individuelles des acteurs du projet déterminant leur satisfaction individuelle par rapport à leur mission, leur adhésion et la considération qui leur est manifestée.

Surveiller le climat relationnel du projet pour prévenir les litiges

La surveillance du climat relationnel du projet vise à détecter les signaux faibles et à prévenir les litiges susceptibles d'apparaître au cours du projet.

La mesure des facteurs climatiques puis leur agrégation détermine, à un instant donné, le climat relationnel du projet.

À chaque facteur climatique est associé un indicateur à mesurer comme l'illustre le schéma ci-dessous.

 Des modalités de mesure clairement définies et partagées

La surveillance du climat du projet doit être prévue dès le démarrage du projet. La démarche employée, les éléments à surveiller et les modalités de mesure des indicateurs font l'objet d'un accord entre toutes les parties du projet.

La mesure des indicateurs repose sur des procédés pouvant se combiner :

  • Observation de réunions
  • Entretiens individuels ou collectifs
  • Enquête en ligne
  • Étude de la production et des livrables du projet.

La nature, l'organisation du projet et les besoins des acteurs déterminent les modalités de collecte dont le schéma ci-dessous propose quelques exemples.

Extraits de facteurs climatiques et d’indicateurs associés
Extraits de facteurs climatiques et d’indicateurs associés

Identifier et traiter les litiges pour réduire leurs impacts sur le projet

Le diagnostic préalable au traitement  

Le  pilotage du projet s'enrichira naturellement des éléments objectifs décrivant le climat du projet tels que collectés et consolidés.

Ces indicateurs permettent de détecter les « signaux » plus ou moins faibles suggérant ou révélant un litige.

A ce stade, le diagnostic distingue la controverse du conflit et peut préciser la nature même du conflit. Christopher Moore (« The Médiation Process ») a cartographié différentes familles de conflits :

  • Les conflits relationnels issus de difficultés de communication et de compréhension mutuelle des parties pour diverses raisons : caractères, interprétation, messages verbaux ou non-verbaux,…
  • Les conflits informationnels fondés sur des distorsions de compréhension ou d'interprétation des informations reçues : différence de compréhension, d'interprétation,
  • Les conflits de valeur basés sur des références personnelles ou collectives à des valeurs distinctes (culturelles, morales, professionnelles,…) entrainant des différences d'évaluation,
  • Les conflits d'intérêt dans lesquelles les parties présentent des intérêts divergents,
  • Les conflits structurels dus à des frustrations générées par une cause extérieure aboutissant à des pénuries de ressources, de temps ou à une trop grande inégalité entre les parties.

À chaque famille de conflit correspondent des familles de traitements possibles tels que l'expose Thierry Garby (« La gestion des conflits – Éditions Economica»). 

La démarche de médiation : un processus éprouvé de traitement des litiges

Le traitement et la résolution d'un conflit sont guidés par un processus que le médiateur a la charge de conduire.

Rappelé ci-dessous, il comprend quatre étapes produisant chacune un  résultat essentiel pour le succès de la médiation (issu de la Roue de Futiak) :

  • En fin d'étape 1, un accord sur le désaccord formalisé par une liste de points constituant le désaccord et que la médiation devra traiter
  • En fin d'étape 2, la reconnaissance mutuelle dans laquelle chaque partie comprend, sans nécessairement approuver, les besoins, valeurs et intérêt de l'autre partie
  • En fin d'étape 3, une liste de solutions ou d'options construite en coopération et susceptibles de constituer des éléments du futur accord
  • En fin d'étape 4, un accord mettant fin au conflit sur lequel les deux parties s'engagent.

Des conditions et des règles à respecter

Une médiation peut s'engager à condition que certaines conditions soient remplies :

  • L'accord des parties sur la nécessité d'engager une médiation
  • L'accord sur la modalité de désignation du ou des médiateurs
  • L'accord sur le choix du médiateur et les conditions générales de réalisation (délais, lieu, coûts,…)

Ces éléments peuvent être stipulés dans la charte relationnelle du projet.

Les règles régissant le bon fonctionnement d'une médiation sont présentées en introduction par le médiateur et stipulent que :

  • Le médiateur est engagé par des règles éthiques : impartialité, neutralité, confidentialité,…)
  • Les parties s'engagent à suivre le processus conduit par le médiateur et sur des règles et des comportements : respect, attitude, confidentialité,…
  • Chaque partie dispose des pouvoirs pour prendre les décisions l'engageant ou engageant l'entité qu'il représente
  • Chaque partie et le médiateur est libre, à tout moment, de mettre fin à la médiation
  • La médiation peut donner lieu à des apartés entre le médiateur et l'une des parties (à la demande des parties ou du médiateur)
  • L'accord issu de la médiation engage formellement chaque partie.
Schéma résumé du processus de médiation
Schéma résumé du processus de médiation

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